mardi 29 Octobre 2024
La Commission des jeux de hasard (CJH) belge a publié un rapport sur l'été 2024, marqué par l'Euro de football et les Jeux olympiques de Paris. Avec des pertes record pour les joueurs et un marché en ligne en pleine expansion, la CJH lance un appel pour des réglementations plus strictes. Retour sur les enseignements de ce rapport et les initiatives de prévention mises en place pour sensibiliser les parieurs aux risques de jeu excessif.
Le football et les paris sportifs entretiennent une relation de longue date, et l'été 2024 l'a confirmé avec des chiffres de participation et de mise sans précédent en Belgique. Le dernier rapport de la CJH, l'été sportif en chiffres (2024) illustre les dynamiques du marché des paris sportifs, en particulier son basculement vers le digital, qui représente désormais près de 70 % des revenus des opérateurs légaux. Ce contexte pousse le régulateur à intensifier ses efforts de prévention et à alerter le législateur sur les lacunes réglementaires actuelles.
Entre le 14 juin et le 14 juillet 2024, période de l'Euro, les pertes des joueurs belges ont atteint près de 47,4 millions d'euros, majoritairement issues des plateformes en ligne. Cette migration vers le numérique, favorisée par des campagnes publicitaires massives, s'est traduite par des pertes croissantes. En comparaison avec les événements précédents, comme le Mondial 2022, le nombre de nouveaux joueurs a diminué, mais les montants misés et rejoués ont atteint des sommets (+23 %). La CJH y voit une évolution préoccupante, car les jeunes de moins de 30 ans représentent environ 40 % des parieurs en ligne, un groupe particulièrement vulnérable face aux risques de dépendance.
La CJH insiste sur le besoin urgent de renforcer l'arsenal juridique pour mieux encadrer le marché en ligne et lutter contre les sites illégaux. Magali Clavie, présidente de la Commission, plaide pour une réglementation modernisée permettant de clarifier les responsabilités des opérateurs. La Commission a également renforcé ses contrôles, notamment via le système EPIS, pour prévenir l'accès des joueurs auto-exclus et protéger les jeunes. Cependant, les moyens de la CJH restent insuffisants pour endiguer le phénomène, particulièrement face aux opérateurs sans licence.
Pour répondre à l'ampleur du phénomène, la CJH a mené cet été une campagne de sensibilisation ambitieuse, intitulée "Fais une pause avec EPIS." Avec deux clips diffusés sur les réseaux sociaux et la télévision, cette initiative visait les jeunes joueurs, rappelant les outils de protection disponibles, notamment l'auto-exclusion via EPIS. Dans son rapport la CJH a constaté très peu de variations dans le nombre de demandes d'exclusion volontaire sur la période étudiée. À l'échelle locale, la ville de Peer s'est aussi associée à la CJH pour promouvoir un jeu responsable auprès de sa population avec la campagne "Ne pariez pas votre plaisir sportif." En parallèle, la CJH a intensifié ses mises en garde envers les opérateurs pour qu'ils respectent les règles de publicité et d'offre de bonus.
Si l'Euro a suscité un engouement massif, les Jeux olympiques ont, eux, généré un intérêt plus modéré avec 368 nouveaux joueurs quotidiens contre 1.031 pour l'Euro. Les mises journalières moyennes ont atteint 6,2 millions d'euros durant les JO, bien en deçà des 8,6 millions enregistrés lors de l'Euro. Cette tendance, observable également dans les agences de paris physiques, rappelle que, malgré les initiatives de sensibilisation, le football reste le principal catalyseur des paris en Belgique.
Les constats du rapport de la CJH appellent à une réaction rapide des autorités pour encadrer un marché en ligne difficile à contrôler et limiter les risques de jeu excessif, en particulier chez les jeunes. La Commission des Jeux de Hasard souhaite voir émerger un cadre légal capable de mieux protéger les joueurs vulnérables et de combattre efficacement les offres illégales omniprésentes sur le net. Dans ce contexte, les campagnes de prévention jouent un rôle essentiel, mais elles ne suffiront pas à freiner une tendance de fond sans un cadre réglementaire adéquat.