vendredi 18 Octobre 2024
Un récent article de Knack a mis en lumière l'impact de la publicité pour les jeux d'argent lors des événements sportifs, notamment en soulignant l'influence sur les jeunes et les joueurs vulnérables. Face à cela, l'Association belge des opérateurs de jeux d'argent (BAGO) a exprimé son désaccord, insistant sur la distinction entre opérateurs légaux et illégaux. Pendant ce temps, la loi Van Hecke tente de réguler un marché en pleine expansion, mais son application reste une bataille de longue haleine.
Le débat autour de la publicité pour les jeux d'argent, particulièrement dans le cadre des événements sportifs, s'intensifie en Belgique. Un article de Knack a récemment jeté un pavé dans la mare en évoquant l'exposition croissante des jeunes aux logos de jeux d'argent, citant des études démontrant que même des enfants en bas âge reconnaissent ces marques. L'article souligne également l'impact de la publicité sur le comportement des parieurs, notamment lors de grands événements sportifs tels que l'Euro de football. Cette situation inquiète tant les chercheurs que les législateurs, qui tentent de freiner l'influence croissante des opérateurs de jeux d'argent.
Au cœur de cette question se trouve la loi Van Hecke, adoptée en 2023 après des années de débat parlementaire. Cette loi introduit des règles plus strictes sur la publicité et le sponsoring des jeux d'argent, en réponse à la prolifération des publicités dans les stades et sur les maillots des équipes sportives. À partir du 1er janvier 2024, les opérateurs de jeux ne pourront plus figurer comme sponsors principaux sur les maillots des clubs professionnels. Cependant, des aménagements permettent encore certaines formes de sponsoring plus discrètes, notamment des logos sur les parties arrière des maillots jusqu'en 2028.
Malgré cette législation, des acteurs comme Napoleon Games continuent de trouver des moyens de contourner les restrictions, en apparaissant de manière plus subtile sur les maillots d'équipes de football comme Anderlecht, tout en respectant techniquement la loi. La loi Van Hecke est perçue par certains comme un pas en avant, mais par d'autres comme une mesure insuffisante face à la créativité des opérateurs de jeux d'argent.
Une étude menée par l'Université de Gand, citée dans l'article de Knack, renforce l'idée que la publicité pour les jeux d'argent, en particulier lors de grands tournois comme l'Euro, agit comme un « accélérateur » pour inciter à parier. Selon cette étude, un répondant sur cinq en Flandre aurait été régulièrement exposé à des publicités liées aux paris sportifs pendant l'Euro 2021. L'impact est clair : plus une personne est exposée à la publicité, plus elle est susceptible de parier.
Ces résultats sont particulièrement préoccupants pour les jeunes et les personnes déjà vulnérables à la dépendance. La publicité pour les paris sportifs devient omniprésente, et même les restrictions mises en place depuis juillet 2023, comme l'interdiction des publicités sur les réseaux sociaux, n'ont pas suffi à endiguer ce phénomène.
Face à cette couverture médiatique et à la régulation accrue, l'Association belge des opérateurs de jeux d'argent (BAGO - Belgian Association of Gaming Operators) a exprimé son désaccord sur certains points soulevés dans l'article de Knack. Pour BAGO, il est essentiel de faire une distinction nette entre les opérateurs légaux, qui respectent les lois, et les sites illégaux, qui ignorent toutes les réglementations et représentent une part croissante du marché.
BAGO estime que les opérateurs légaux en Belgique se conforment strictement à la réglementation, notamment les interdictions récentes sur la publicité excessive. Cependant, l'association souligne que la publicité visible aujourd'hui provient souvent d'opérateurs illégaux, notamment des sites de paris qui n'ont pas de licence en Belgique mais ciblent tout de même les joueurs belges, en particulier via les réseaux sociaux.
Selon BAGO, environ 60 % du marché des jeux d'argent en Belgique est désormais sous le contrôle de fournisseurs illégaux. Ces plateformes, souvent basées hors d'Europe, peuvent contourner les interdictions et diffusent des publicités agressives sans restrictions. Cela pose des risques sérieux pour les consommateurs, qui n'ont aucune protection sur ces sites non régulés, contrairement aux sites légaux qui surveillent le comportement des joueurs et appliquent des mesures de jeu responsable.
BAGO appelle donc à une répression plus sévère contre ces opérateurs illégaux, demandant que la Commission des jeux de hasard (CJH) soit dotée de plus de moyens pour renforcer les contrôles et imposer des sanctions efficaces. Pour BAGO, tant que le marché illégal continuera de croître sans être contrôlé, les efforts des opérateurs légaux seront en vain, et la sécurité des joueurs restera compromise.
Bien que la loi Van Hecke et les mesures prises par la CJH visent à limiter l'exposition à la publicité pour les jeux d'argent, de nombreux experts estiment que ces efforts sont encore insuffisants. L'un des problèmes soulignés par Knack est le manque de rigueur dans l'application des sanctions. La CJH, sortie d'une crise interne, est accusée de manquer de fermeté face à l'expansion rapide du marché des jeux d'argent, notamment en ligne. Les chercheurs, comme le professeur Bram Constandt de l'Université de Gand, comparent la situation à celle de la régulation de l'industrie du tabac, où les acteurs de l'industrie trouvent continuellement des moyens de contourner les nouvelles règles.
La situation est d'autant plus complexe que, comme le souligne Knack, il existe une divergence culturelle en Belgique sur la perception des jeux d'argent. En Flandre, le discours public met l'accent sur la protection de la santé publique, alors qu'en Wallonie, la défense des intérêts économiques des casinos et autres opérateurs semble prédominer.
Le débat sur la publicité pour les jeux d'argent en Belgique reste vif, alors que le gouvernement tente d'encadrer une industrie en pleine expansion tout en luttant contre un marché illégal de plus en plus présent. La loi Van Hecke marque un tournant, mais son efficacité dépendra en grande partie de la capacité des autorités à renforcer les contrôles et à appliquer les sanctions de manière plus rigoureuse. Pendant ce temps, les opérateurs légaux représentés par BAGO se battent pour être dissociés des pratiques illégales et pour continuer à opérer dans un cadre légal plus sécurisé.
Le chemin vers une régulation efficace semble encore long, et les débats entre santé publique, liberté d'entreprise et protection des consommateurs ne sont pas près de se clore.