mercredi 8 Janvier 2025
Avec l'entrée en vigueur d'une nouvelle réglementation ce 1er janvier 2025, le sponsoring sportif par les opérateurs de jeux de hasard est drastiquement limité en Belgique. Une mesure qui bouleverse le paysage financier des clubs de football professionnels, contraints de revoir leur stratégie en urgence. Mais la transition s'annonce complexe, entre contournements de la loi et enjeux économiques.
Depuis des années, les clubs de football belges dépendent fortement des partenariats avec les sites de paris et de casinos en ligne. Ces derniers représentaient une manne financière estimée à 20 millions d'euros par an pour les équipes de D1A et de Challenger Pro League. Cette époque touche à sa fin. Une loi, adoptée en février 2023, interdit désormais les publicités visibles de ces opérateurs sur l'avant des maillots et autour des terrains. Seules des mentions discrètes, limitées à 75 cm² sur le dos ou les manches des maillots, sont encore permises, mais uniquement pour une durée transitoire de trois ans.
Pour certains clubs, cette transition s'apparente à une course contre la montre. Anderlecht, par exemple, a remplacé Napoleon Games par l'agence de voyages Sunweb, tandis que le Standard de Liège a choisi un sponsor controversé : Circus Daily, un site d'informations sur le sport qui reprend à la fois le logo et la marque du bookmaker Circus. Ce choix s'inscrit dans une tendance plus large où certains clubs tentent de contourner la loi en exploitant des marques dérivées.
De son côté, le Cercle Bruges affiche désormais Golden Palace News, un site d'informations sportives qui utilise le logo et la marque du bookmaker Golden Palace. Une stratégie similaire est adoptée par Charleroi et le Club Bruges, qui arborent respectivement U-Experts, une déclinaison du bookmaker Unibet, et par l'Antwerp avec Antwerp First, étroitement lié à BetFirst.
Ces stratégies, bien qu'ingénieuses, sont dans le viseur de la Commission des jeux de hasard (CJH), le régulateur belge du secteur.
La CJH a clairement indiqué son intention d'appliquer strictement la loi. Magali Clavie, sa présidente, a rappelé que l'utilisation d'un nom, logo ou marque associé, même indirectement, aux jeux de hasard est considérée comme une publicité.
« La loi définit la publicité comme tout ce qui promeut directement ou indirectement les jeux de hasard et incite à jouer. L'objectif est de protéger les joueurs et de limiter la publicité. Les contournements, comme les marques dérivées ou les fondations associées aux opérateurs, ne sont pas conformes, » a déclaré Clavie. La Commission prévoit des sanctions, allant jusqu'à la suspension de licences, pour les opérateurs ou clubs qui enfreindraient ces règles. Pour les clubs, la tâche est double : combler les pertes de revenus liées à la disparition des sponsors issus des jeux de hasard et trouver des alternatives viables. Si des clubs comme Lokeren ou le RFC Liège ont opté pour des sponsors locaux (Jam Group ou BigMat), d'autres peinent encore à trouver des partenaires adéquats.
Dans ce contexte, certains dirigeants comme Pierre François, CEO du RFC Liège, dénoncent une réglementation qu'ils jugent disproportionnée : « Interdire la publicité pour les sites de paris réglementés, tout en permettant à des opérateurs illégaux de prospérer via d'autres canaux, pose question. » Malgré ces critiques, le ministre de la Justice, Paul Van Tigchelt, reste catégorique : « Il faudra sanctionner les infractions pour garantir le respect de la loi. »
Voici un aperçu des changements de sponsors par club :
Alors que la saison 2025 débute, l'avenir du sponsoring sportif en Belgique reste incertain. Les clubs devront non seulement s'adapter à un cadre réglementaire plus strict, mais également trouver des solutions pérennes pour assurer leur équilibre financier. Entre créativité et respect de la loi, la transition sera un test pour l'ensemble du football belge.